dimanche 3 décembre 2017

avec Olivier Michel

Le mois de juin est un éparpillement étonnant de nuances estivales ourlées de vivacité et de sève nouvelle.. je suis arrivée en Bourgogne, du côté de Beaune, à Chassagne Montrachet, un des temples des saveurs viticoles d’excellence et de tradition ô combien protégée..

" Une partie de campagne" rassemble sur ces coteaux ensoleillés des galeries et des artistes et des amateurs d’art. Les portes des caveaux s’ouvrent et nous découvrons aussi d’autres demeures, villageoises, pour un accueil particulièrement effervescent.
Le village soudain revêt des allures de village piéton, les uns les autres, plan toujours drôlement glissé sous le regard, déambulant de ci de là, rarement vraiment égarés.. et les sourires des personnes rencontrées accompagnent rapidement nos pas hésitants sur le bon chemin..

Il est des saveurs de cave et de dégustation.. comment renoncer ?? le désir d’évoquer, avant de vous entraîner de ci de là, cette soirée particulièrement chaleureuse dans les caves du Château de Chassagne-Montrachet, écrin du programme Mécénat Picard. Ce soir là les candélabres orchestrèrent une magnifique farandole d’ombres sur les parois des cuves, des barriques.. ivresse aussi de ces mouvements en ondulations oniriques.. les artistes, les galeries, les pèlerins en art étaient là, joyeux de ce partage magnifique et des échanges surprenants galopant de table en table..
Auparavant..
Je parcourus les lieux sélectionnés, étonnée toujours de pousser des portes presque secrètes, du moins discrètes.. Les bouteilles somnolent, plus bas dans les caves obscures.. chut !

A la sortie du village, tout près de la place des Noyers, la Galerie de Rejane Louin a invité Olivier Michel dans les chais du Domaine Jean-Noël Bagnard. Je ne connaissais pas Réjane.. Je ne connaissais pas Olivier. Ce fut une belle rencontre. Un dialogue peu à peu se tissa entre nous trois et le travail de l’artiste s’enroula totalement autour du fil tenu de mes étonnements.. Est-ce le bleu presque Klein, les variations tracées au stylo bille, les cyanotypes sur papier..? je ne sais, mais je sais que Réjane, patiemment, m’entraîna vers l’univers du travail d’Olivier et je ressentis alors cette désormais reconnaissable émotion du temps qui passe, de la trace, d’une forme de simplicité, «  un parti pris qui permet la mise en place de règles qui assoient et cadrent son travail. « 

La galerie de Réjane est à Locquirec. Je sais qu’un jour, j’irai découvrir ce village et pousser la porte de son antre.. parce que c’est beau là-bas et que la Manche clapote.. En attendant j’ai glissé dans ma cariole cette oeuvre, un cyanotype sur papier.. une oeuvre au bleu dont le procédé de travail fut découverte.. et je vois des cheveux d’ange dansant sur le papier..




mercredi 22 novembre 2017

avec Céline Cléron...

Paris.. le mois de Mai peaufine ses intentions printanières.. la lumière est à nouveau zébrée d’étincelles, le jour s’enfuit moins vite.. la flânerie est de mise et l’événement Choices, initié par la Galerie Papillon il y a quelques années déjà,  m’entraîne à nouveau dans le tourbillon de la curiosité, de l’étonnement.. de la rencontre artistique..
Ces rendez-vous m’offrent la sensation, toujours, d’embraquer pour un nouveau voyage, destination inconnue.. Une sorte de jeu sérieux dont la joie caresse doucement des mémoires enfantines de parties de cache cache ou de chasse au trésor .. la campagne est vaste !

Ce jour là Céline Cléron est l’artiste invitée de la Galerie Papillon. Les oeuvres de cette exposition plongent dans L’horizon des évènements, thème retenu pour cet évènement. Je me souviens.. très vite le vertige de l’équilibre me surprend, comme une ivresse juste offerte par une première gorgée de vin à la robe grenat, ces vins que le temps a retenus dans l’obscurité d’une cave et qui dévoilent, un jour par hasard, ses intentions magnifiées de maturité.. Surprendre.. étonner..

J’arpente l’espèce, tanguant devant ce vaisseau caravelle juché sur un toboggan qu’il semble sur le point de dévaler.. cette oeuvre s’intitule Une minute de latitude.. je demeurerai aussi longtemps intriguée par les oeuvres constituées de toises, Conseil de Révision.. et par un buste de femme intitulé Lacrimosa.. et tant encore assemblées là dans ce même vertige..

Je feuillette alors le Catalogue de l’artiste. « D’un règne à l’autre/ Le perchoir d’Horus »  comme si le désir, lointain et pas encore nommé, me guidait vers autre chose.. Je voulais visiter encore et encore cet univers.. pousser des portes, parcourir des corridors.. une sorte de  partie de colin-maillard.. les yeux ouverts mais les mains tâtonnantes..
Sur une page, une photographie.. La perspective d’un couloir immense et le profil d’une religieuse à l’étonnante coiffe/cocotte en papier.. Il me revient en mémoires.. l’immensité du temps immobilisé dans le couvent des dominicaines qui fut cet emprisonnement de pension des années durant.. Pourquoi alors revenir sur cette image, ce cauchemar du temps que je ne parviens toujours pas à faire glisser dans l’oubli ?.. peut-être grâce à la coiffe/cocotte en papier qui m’autorise à basculer alors dans le jeu, le pliage..  les après-midi de vacances chez ma grand-mère à apprendre la minutie des formes pétries par les angles et les lignes  du papier cartonné blanc..

Une pirouette soudain pour repeindre ces années là..

L’oeuvre Construction#1 est là, posée sur un chevalet de bois élégant. Elle regarde mon petit monde.
Céline Cléron - Construction #1, 2009  - Photographie couleur contrecollée sur aluminium - 90x60 cm - Edition de 3 + 2A

mardi 29 août 2017

avec un été finissant...

Ce matin .. le désir, ou l’envie, de juste badigeonner cette plage bien ratissée de mots collectés sur les rivages de mes ailleurs en lisière Atlantique!

Bonjour.. je reviens de là-bas.. c’est tout près et tellement inaccessible.. Il faut juste avancer, les yeux clos, et écouter le chahut des vagues.. après?..  s’abandonner.. ça flotte!!

Il y a le ciel et un petit air de rien qui enivre..

Baudelaire merci!

Ce matin le soleil se débrouille derrière les stores affalés.. je suis occupée.. vider les valises et poser chaque pépite de cet été finissant à sa place.. impossible!! il y a toujours un pas cadencé de cheval de trait qui murmure dans les sillons gargouillants d’une ivresse en cueillette.. un étang qui reflète des cieux trop vastes.. une paire de bottes à deux pieds droits qui masque le spleen d’une propriété d’excellence du bordelais… des tréteaux un peu bancals posés sur le sable et des huîtres peuplées de perles enfantines qui ouvrent les yeux  sur des marées hautes et des marées basses..

Il y a toujours par là-bas aussi une maison immuable qui protège dans sa cabane des chaises longues décolorées, des jeux de croquet qui n’oublient pas les aspérités du parcours, des jouets piochés sur les étals des immortels marchands de plage.. des planches à voile essoufflées..

Il y a surtout une nouvelle Maison qui s’est installée à côté.. parce que pour h. le souvenir du varech et des bigorneaux cueillis dans la vase, enfant, était trop tenace.. et que la porte doit s’ouvrir sur maintenant..

Il y a aussi des tables de petits déjeuners invitant de grands enfants pétris de rires à embarquer déjà vers leurs évasions colorées.. les framboises du jardin clignotent dans les coquillages cueillis sur le rivage..

Un peu plus loin, à l’écart, et doucement protégées par les premiers contours des Pyrénées, il y a les vignes d’Yvonne, une amie qui planta ses pieds aux cépages magnifiques à soixante ans.. il y a plusieurs décennies.. je devrais me dépêcher!! et puis non, je serai juste attentive à ce que ce millésime 2017 soit suivi du 2018.. que cette Dame merveilleuse prolonge encore longtemps son savoir faire  .. juste espérer  pouvoir encore m’asseoir à ses côtés et l’écouter éplucher ses histoires de vendanges, de pressoir, de dégustation, de moûts de raisin.. et déambuler dans les sillons en surveillant aussi l’éclat des figues et la bonne mine des pommes..

La côte basque sait contenir les notes légendaires du baron de l’Epée en son fief d’Illbaritz.. le besoin insatiable de revenir là.. piocher ce que le temps a, d’une pirouette, transformé en légende.

Et.. mais tout cela est sans grande importance..

Ce matin l’air ne parvient pas à déposer l’été et je vais, dans un présent toujours étonnant, me mettre en route pour Tulette..J’attendrai peut être que les ombres s’allongent.. Là, en cette maison de vigneron juste attentive à protéger les empreintes fugitives d’un bleu sulfate qui courent sur les vieux murs, là je vais contempler aujourd’hui: le travail des artistes venus en résidence en juin. Demain tout sera replié et un autre aujourd’hui se déposera sur le seuil de mon temps ..




mercredi 21 juin 2017

avec Matthieu Cossé

Paris.. en ce mois de mars, l’hiver est encore ancré sur la cité, les arbres somnolent et le ciel.. ah le ciel!! il improvise des humeurs en flanelle voilée.. majeure!

Je suis au Salon du Dessin Contemporain- Drawing Now, dans l’espace étonnant du Carreau du Temple dont la façade monumentale s’ouvre sur la rue du Temple,  avec ses pavillons de métal, de verre et de briques! magnifique!
Un rendez vous!
jJai déjà évoqué ces lieux de retrouvailles intimes.

Les travées dessinent une sorte de jardin / labyrinthe.. une atmosphère fantaisiste et recueillie, un peu badigeonnée d’excitation en école buissonnière.
La gravité et le sérieux se déposent toutefois à nos côtés.
Les passionnés de ce salon se regroupent, complices et conscients d’un esprit un peu «  club » , en proximité des galeristes, eux aussi parfaitement adaptés aux dialogues qui vont s’établir.. Un salon d’habitués, attentifs à retrouver leurs partenaires.. Une silencieuse procession légèrement scandée de savoureux bavardages murmurés.
Respect!

Je suis seule et évolue en parfaite liberté, ourlée de légèreté, dans ce dédale d’étonnements toujours.. l’esprit affuté tel celui déployé lors d’un jour de chine dans des déballages d’objets de l’antan.. la conscience de, peut-être,  dénicher un trésor, un trait qui demeurera suspendu à mon désir, soudain..

Je prends mon temps, une sorte de dégustation en couleurs, en mines de plomb et en peintures à l’eau, en collages et en découpages, le papier toujours présent!
Il s’imprègne de matières, se perfore, ondule ou soudain assume l’audace d'une tâche, d’un relief, d’écritures scrupuleusement tracées, sans tremblement.. Je retiens aussi mon souffle, ne pas distraire la ligne..

Mes galeries sont là.. Anne Barrault, Polaris, Bernard JordanSemiose  Papillon, Anne de Villepoix, Eric Dupont.. et tant encore .. ils tracent ma carte de géographie artistique!!

Je glisse de l’une à l’autre, bavarde ici ou là. Je sens cette petite perle de plaisir qui, l’air de rien, accompagne ma respiration.
Repérer / choisir.. un balancement entre désir, envie et raison!! ah! cette raison!! elle perd l’équilibre  toutefois un peu lors du choix.. car cette bousculade intérieure fait partie de la décision, elle en imprime la force, la rage, la nécessité, l’urgence..

Je m’arrête devant la galerie Semiose.. au fil de ces heures déroulées, je sais depuis le début qu' un petit tableau, une aquarelle, me fera tanguer et deviendra ma nécessité d’acquisition ce jour là! L’oeuvre se nomme Piscine. Matthieu Cossé l'a tracée.
 Elle est surtout le miroir, ce double qui tente de refléter la silhouette et, plus intimement, cette inconnue intérieure qui doucement me fait la révérence!

Regarde!!
L’ombre et la lumière..
La nuit et le jour..
Le ciel et la terre..
Le paysage  et le reflet..
Le vrai et le faux..
La réalité et le rêve..

Et le transat se glisse sur le pont d’un navire.. évasion!



Matthieu Cossé - Piscine - Encre sur papier beige, 23 x 32cm © Collecyion IdL 2017









dimanche 23 avril 2017

avec Simon Ortner

Le jour de Pâques, la Galerie de Kamila Regent, dans le Lubéron, dénoue le rideau soyeux d’une porte refermée pour l’hiver.. la lumière jaillit, et la nouvelle saison nous étonne toujours, impatiemment.
Le soleil et les étincelles de clarté  sont particulièrement complices pour cette journée rituelle.. le verger ondule sur une mousson de verdures.. les iris, les lilas et les fleurs sauvages se déhanchent avec grâce et naturel finalement..
Sous le poirier, comme d’habitude, la longue table a revêtu ses jupons blancs.. il y a du sirop de sureau, de l’eau parfumée de citron et de gingembre.. les saveurs de chaque année.
Il y a surtout la farandole des gâteaux, traditionnelles cuissons polonaises pétries par Kamila.
Il y a aussi le son de l’accordéon.
La beauté est là, dans ce désir d’offrande et de générosité.

Le premier jour.. jour de rentrée.. la surprise.. de quelles couleurs les murs de la galerie auront-ils été repeints?
Quels artistes auront été invités?..ils sont à nos côtés, soucieux de garder l’ombre, et nous pouvons bavarder avec eux, en une sorte de presque silencieux dialogue. Leurs oeuvres sont là déposées. Soyons attentifs à ne pas oser trop de mots. Je croise le peintre Simon Ortner  Il m’étonne par ses connaissances de la terre.. oui, il est aussi jardinier..

Alors, je déambule dans les corridors, les salons, celui d’en haut, celui de l’étage, rouge et majestueux. Je descends au jardin aussi pour reprendre souffle, me rafraîchir, savourer, échanger avec les uns les autres.

Peu à peu, telle une petite vague de fin de marée, une onde venue d’ailleurs se faufile dans mon être.. je suis seule et les dessins, les peintures, les sculptures.. l’air de rien,  ondulent, ralentissent, avancent, reculent.. l’impression d’une mise en animation en mode ralenti.. oui  « mon »  petit univers se met en place, une sorte de scénographie intérieure, et doucement un peu de presque familiarité se glisse ente nous, les oeuvres et moi, dans le respect immense d’une non appartenance et la sensation tant de fois éprouvée qu’il se passe quelque chose qui déjà m’échappe.

Alors, un petit tableau aux sons mélodieux - oui la peinture à l’huile résonne tellement que son épaisseur et sa présence font presque crisser la toile - se présente à moi dans toute la beauté de sa tenue débarrassée de séduction..
Une sorte de fragilité timide et noblement paysanne, encadre la puissance énorme de ces horizontalités rouges et noires, sombres mais tellement transparentes.. une fenêtre ouverte sur la terre, l’océan, le ciel.. Un point de vue extraordinaire..

Et cette musique je sais, revient d’un ailleurs familier.. peut être celui d’un enfant piochant l’ocre du jardin au son de l’ Angelus tandis que les ombres descendent sur les sillons..
Le tableau est signé Simon Ortner.

Merci pour tant de respect.

Simon Ortner - Paysage, 2017, huile sur toile ©Collection IdL

Simon Ortner - Paysage, 2017, signature au verso  ©Collection IdL




vendredi 21 avril 2017

avec Destinerrance

Fin janvier, le froid était vif et particulièrement malmené par un mistral de grande indécence..

Noël était loin déjà.. Certes, dans la crèche, la mousse avait perdu de sa fraîcheur, les brindilles végétales étaient un peu groggy.. les santons patientaient encore avant de repartir sommeiller dans leurs papiers de soie, au fond de leur caisse en bois qui disparaîtra ensuite au fond de l'armoire.. ma Grand-mère disait leur départ le jour de la Chandeleur.. l’enfance grappille toujours des petites pépites de rituels..

Ce soir là, j’avais convié sur mon plateau de chêne des Amis, des Collectionneurs, des Artistes, des Curieux aussi osant grimper là-haut et dénicher la farandole des oeuvres qui, vous le savez, dansent sur les cimaises de mon appartement ou galopent sur les planches..

Laurent Baude proposait ses sculptures et ses dessins récents.

Des petites ripailles et le vin du frère, " Tout va bien ", retenaient doucement les passants.. Une petite fête en intention artistique. J’apprécie ces instants particuliers, à l’écoute des étonnements, à l’affût des regards attentifs ou un peu désarçonnés.. Il se crée ainsi un réel lieu de rencontres, petits maillons merveilleux pour élargir le minuscule univers de l’art présenté ici, sans artifice..  l’intention juste de proposer!

Je rencontrais alors la responsable du Musée d’Art Contemporain de Châteauneuf-Le-Rouge- ARTEUM.
Un dynamisme étonnant anime cette structure, à la lisère d’Aix-en-Provence..

La nuit était noire depuis longtemps et le froid, derrière les stores affalés, maintenait ses intentions. La plupart des visiteurs avaient redescendu le grand escalier, emmitouflés d’hiver.. et de joie je crois..

Quelques amis prolongeaient doucement la saveur particulière que revêt toujours une fin de soirée.. hésitant à piétiner ces instants fragiles et merveilleux.

Les voix étaient ourlées de ce ton particulier adopté au creux des alcôves, murmurées.. Une sorte de pause.

Je conversais alors avec Christiane et Rindala, totalement et magnifiquement  impliquées dans un projet d’exposition pour ce musée donc, ARTEUM.

DESTINERRANCE..

Ce mot, seul, m’enchanta et m’entraîna si vite sur les sentiers du voyage, de l’ailleurs, de toutes ces intentions, même immobiles, que nous déployons pour tenter de connaître, d’apprendre, de nous tromper aussi.. Une révolution sur nous-mêmes..
Que de jeux de piste, de labyrinthes, de chutes, de marches, de soif et de faim, de soleil et de pluie, de voiles hissées et affalées, de solitude et de foule, de rires et de  larmes ..  pour tenter de pétrir ces «  immenses minuscules «  qui se blottissent dans l’inconnu.. l’inconnu du monde, l’inconnu de soi-même..

Rindala et Christiane m’ont demandé l’autorisation de prêter trois de mes oeuvres pour un voyage à Châteauneuf-le Rouge.. petit village que je n’avais alors jamais pointé sur la mappemonde..

Quel étonnement!! une sélection pour moi semblable à celle élaborée pour les grands prix des pur sangs qui s’alignent derrière les barrières..  des battements d’émotion.. J’étais confuse.. et tellement honorée - oh!! - de ce projet.. Mais oui bien sûr, mes oeuvres iront faire les belles dans ce musée et gratifieront par leur allure l’excellence d’un travail de qualité en préparation.. alors, oui je dis !. une grande fierté se glissa dans les larmes retenues de cette belle conversation..

Ont été nommées :

- Niki de Saint Phalle

- Pierrick Sorin 

- Pip Culbert

Bon voyage vous trois.. mardi je vous empaillerai de papier bulle et de carton d’emballage .. et bien sûr, je vous accompagnerai au Château.. ne pas vous abandonner.. vous prêter pour que d’Autres aussi vous fassent la révérence.. et je reviendrai vous chercher.. je vous garde la place!!

samedi 11 mars 2017

avec Françoise Pétrovitch (2)

Je suis au boudoir.. du salon, les échos d'un concert de Keith Jarrett.. création

La fenêtre est grand'ouverte sur l'arbre mort.. 

Et le petit cheval à bascule de Soutard a immobilisé l'enfance.. 

Et si je vous parlais de Françoise Pétrovitch..?



    





Nous sommes en 2012.. en quelle saison ? je ne sais plus.. nous  cheminons.. Kamila et moi.. rencontrer Françoise Pétrovitch chez elle, en son atelier dans les environs de Paris..
Sa pièce de création est tout en haut de la maison.. le Grand Atelier que je découvrirai un an plus tard, dans son jardin, est alors en échafaudage.. Une maison paisible, généreuse, accueillante..Il y a des fleurs dans un vase.. le thé bientôt fumera dans les bols.. Une vraie maison !!

Là-haut, Françoise déploie pour nous des dessins, des traits, des feuilles de papier délicatement déposées à l'intérieur de boîtes, de tiroirs.. les formats sont amples, la trame du papier   est épaisse.
Ce papier ressemble à ces feuillets utilisés alors pour recopier, sur les bancs de la petite école de mon village, des compliments offerts à une fête des mères, à une fête des pères.. ruban rose, ruban bleu en lien..

Il y a aussi des sculptures, des boîtes à musique.. l'ordre est minutie et respect.. seuls des murmures de papiers pétrissent le silence presque mystique de ces lieux de travail.. A genoux, je découvre l'aquarelle, les visages d'enfant, les becs d'oiseau, les oreilles de lapin, le crayon.. une sorte de symphonie intérieure dégringole en moi.. Oui, Françoise Pétrovitch saura dire ce que, maladroitement sûrement, je lui confierai plus tard, lors de nos promenades en forêt. Françoise pourra exprimer sur papier, en couleurs jointes à l'eau, mes mémoires d'images un peu brouillées de l'enfance, mes images, seules traces d'un autrefois de petite fille..

Le métro nous reconduit à Paris.. je suis, je m'en souviens, silencieuse et chancelante..

Le printemps nous accueille très vite à Saignon, dans la résidence d'artistes et la galerie de Kamila Regent.. Là, nous partageons plusieurs jours avec Françoise. Les rituels de cette maison nous sont  familiers.. Il y a les longues balades en forêt avec Tchai, labrador au pelage vanille.. le crépitement du bois ramassé et jeté alors dans la cheminée au retour.. les diners de saveurs .. un peu d'ivresse aussi et des nuits de profond repos, scandées par l'autorité des cloches de l'Eglise..

Françoise écoute, retient je pense, les mots dits. Je raconte mes souvenirs de petite fille, là-bas dans cette demeure familiale martelée de rites, de rigueur, mais aussi de belles évasions en potager et poulailler.. la confiture de mirabelles écumée dans son chaudron de cuivre sur la cuisinière à bois, les petits fruits d'or dénoyautés alors par nos mains malhabiles d'enfant, armées juste d'un bout de sarment pointu.. les odeurs, les bruits de cette cuisine ancestrale et l'oeil toujours attentif d'une grand mère étonnante..

J'évoque aussi les coquelicots, fleurs ô combien éclaboussantes de lumière. Le souvenir de ces boutons velus dont nous provoquions l'ouverture pour découvrir alors des petites poupées, un peu flétries certes, qui dansaient toutefois dans notre univers d'alors.. J'ai toujours aimé les coquelicots dans les champs .. je les retrouve chaque année mêlés aux blés de printemps, tâches rouges claquant dans les campagnes de Provence..

Ma grand mère était cette présence permanente à nos côtés.. l'arbre de Noël ressemble encore aux dessins des petits en maternelle.. haut et parfaitement équilibré dans la rythmique de ses branches vertes et légèrement pointues.. je me souviens des jouets d'autrefois.. d'un tableau gigantesque qui régnait dans le grand escalier.. une arrière grand mère en amazone.. je lui ressemble tant, disait-on alors..

Il y avait le petit cheval à bascule rouillé par tant de galops immobiles en corridor.. il y avait surtout l'ami Capy, magnifique berger allemand qui fut le compagnon le plus fidèle de ces petites années.. Il était notre ami, notre confident, notre oreiller.

Chemin faisant, aux côtés de Françoise, dans cette campagne sans artifice et seulement parée de la beauté des saisons, j'évoque aussi les petits chagrins du moment..  ma petite soeur avait ôté sa menotte de la mienne.. ou était-ce moi qui l'avait abandonnée..?

Les six aquarelles que Françoise réalisera alors après tous ces jours, toutes ces escales en bavardages, en silence aussi, en sourires et en larmes retenues ont été glissées dans un magnifique écrin de toile bleue.. une boîte merveilleuse, un trésor hautement personnel qui se glisse avec pudeur au creux de la collection que j'élabore au fil du temps..
Vous reconnaîtrez Capy, le coquelicot, l'arbre de Noël, l'oiseau.. pour les ailes!.. l'aïeule.. il y a aussi cette petite fille isolée comme agenouillée..
Vous déposerez surtout votre regard sur la petite main d'Hélène glissée dans la mienne.. une  petite fille blonde, une petite fille brune..

L'azur en Zigzag.. un recueil de six aquarelles rares et précieuses.

                                
                          Françoise Pétrovitch - L'Azur en Zigzag, 2012
                                          © Collection IdL 




Françoise Pétrovitch - L'Azur en Zigzag, 2012
© Collection IdL
Françoise Pétrovitch - L'Azur en Zigzag, 2012
© Collection IdL
Françoise Pétrovitch - L'Azur en Zigzag, 2012
© Collection IdL  
Françoise Pétrovitch - L'Azur en Zigzag, 2012
© Collection IdL 
Françoise Pétrovitch - L'Azur en Zigzag, 2012
© Collection IdL
Françoise Pétrovitch - L'Azur en Zigzag, 2012
© Collection IdL



lundi 6 février 2017

avec Didier Tisseyre

En automne souvent, je grimpe sur la colline, là-bas à Saignon.. Chambre avec Vue est accueil et repos..  le désir d'un feu de cheminée, de promenades en nature rougeoyante et parfumée, de cueillettes de saison, du coing au raisin sans oublier bien entendu les champignons qui percent le feuillage déjà à terre des grands bois.. le désir d'un repli en art aussi, cette saison permettant de belles résidences d'artistes.
Didier Tisseyre est là, venu en presque voisin picorer ces merveilleuses pépites du mois d'octobre.. il y a toujours un vin de vigneron à déboucher et une merveilleuse potée fumante mitonnée par la maîtresse de maison !
Nous sommes en conversation artistique. Je découvre le travail de Didier, sculpté dans le cristal.. les pièces sont lourdes, élégantes et parfaitement graphiques !! la transparence est épaisse et autorise de surprenantes improvisations de lumières.. des éclats retenus, mats, comme si la préciosité de la matière préservait aussi, avec élégance, des attitudes de discrétion. Le poids des sculptures semble allégé par la beauté délicate des modèles.. les fleurs sont là, en construction, encore repliées dans les échanges que nous martelons, vivement, et soudain imprégnés d'une sorte d'urgence. L'urgence de voir, de recevoir, dans les mois qui s'égrèneront alors, ce bouquet d'étonnements..

Didier évoque la Croatie, terre du travail du cristal.. cet ailleurs devient alors exotique, lointain et mystérieux.. cet inconnu participe alors à la surprise en élaboration.. .. les fleurs cueillies sur une autre terre, différente, bousculée par l'histoire..mais toujours une terre d' Art, inlassablement, véritable flambeau d'un peuple courageux..
Le temps de la création est en route et, en attente, le suivi du travail de l'artiste, en son atelier.. Il y aura tout d'abord des maquettes de carton qui deviendront polyester.. le temps des patrons, petits bouts de papier qui dirigeront la forme, l'audace, la force du créateur, comme en haute couture!!
L'artiste voyagera, présentera des bouts de moulage...

Et vint le jour de l'arrivée des grosses caisses de bois, lourdes et massives, écrins impressionnants qui déposeront là, une main fleur, droite et majestueuse, et deux fleurs cueillies sur le sentier de la beauté.. Ces sculptures, à même le plancher de chêne, sont  la mémoire peut être des perce neige, ou des pois de senteurs ou des jonquilles ou des petits cyclamens qui s'éveillaient alors au fil des saisons en des coins sauvages d'une propriété qui s'en est allée..mon jardin imaginaire refleurit !!

Didier Tyssière - Fleur Bleue, 2013
Collection IdL

Didier Tyssière - Fleur Bleue 2013
Collection IdL

Didier Tyssière - La Main 2012 
Collection IdL
Didier Tyssière - La Main 2012 
Collection IdL





mardi 17 janvier 2017

avec Pavlos Nikolakopoulos

Paréidolie, un nom étrangement complexe, certes, mais il est  l’appel d’un événement magnifique au château de Servières, à Marseille.. Pareidolie, un mot empli de voyelles et difficile me direz vous à retenir et surtout à expliquer.. Pour apaiser nos  inquiétudes, je citerai que L’identification de visages dans les nuages est un exemple classique de paréidolie.
Paréidolie est donc le nom ô combien savant du Salon du Dessin Contemporain de Marseille. Le mois d’ Août s’échappe doucement.. la chaleur demeure toujours cette sorte de pâte épaisse qui alourdit l’air.. les éventails, mi masques de festival, mi accessoires improvisant un semblant de courant d’air, ondulent devant les visages. L’humeur est joyeuse ce matin là, une joie particulière qui se dandine au creux des espaces des galeries sélectionnées pour l’évènement.

Je sais que je vais découvrir de nouvelles oeuvres. Je suis surtout attentive à arpenter calmement les lieux.. retenir mon souffle aussi pour mieux accueillir les émotions qui, inévitablement,se faufileront ici et là.. je retrouve " mes " galeries, celles qui dévoilent toujours des oeuvres sur papier qui, très vite, établiront une réelle complicité avec moi..
Je retrouve aussi les habitués, les visiteurs toujours fidèles à cet événement de la fin de été. Les visages sont légèrement tapissés d’un voile "  bonne mine "  subtil et flatteur dérobé à l'éclat des mois écoulés..

Je m’approche de la Galerie Analix Forever. Barbara Polla est là. Barbara est un sourire immense, une silhouette à la présence élégante et féminine. Elle m’accueille avec "  tout ça ".. L’année précédente, nous avions déjà eu une première rencontre, une de ces rencontres silencieuses dont les gestes, le regard disent tout ce que des mots à ce moment là auraient ébouriffé.
Je savais déjà que la sélection de ses artistes se glisserait directement dans les tiroirs de mes préférences, ma " préférence " étant ce je ne sais quoi qui, sans préavis aucun, active une sorte de fil électrique invisible entre l’œuvre et moi.. foudroyée !
Une zébrure émotionnelle m’installe  devant une œuvre, m’immobilise.  J’enfouis mon regard au plus profond des strates du dessin, de l’épaisseur du trait, de l’harmonie des mines de couleur.. puiser dans l’invisible de mon être ce que le trait a glissé..  peut être une révélation ? je ne sais.. mais un dialogue, prolongement de ma pensée - ou plutôt de mon désir - s’impose et je ne peux, en aucune façon, abandonner ce dessin si particulièrement relié aux cimaises par ses pinces noires.

Ce dessin, disons alors " mon dessin ", me parle d’équilibre, cette droite oblique - rouge et noire -  qui est depuis longtemps ma position sur cette planète.. mon échelle d’intention.. gravir et, quelquefois aussi, glisser un peu, reculer mais toujours lutter pour avancer.. L’œuvre est sans surcharge, débarrassée des encombrants.. Elle est magistrale dans son élégante dignité de dépouillement. Elle est l’oeuvre de Pavlos Nikolakopoulos, de la  Grèce. Le blanc.
Dans un coin, noires et discrètes, quelques marches.. gravir encore, même à l’écart.

Pavlos Nikolakopoulos © Collection IdL

mercredi 21 décembre 2016

avec Françoise Pétrovitch (1)

Françoise Pétrovitch vient de s’installer dans un magnifique atelier, tout dernièrement aménagé en son bout du monde, dans la banlieue parisienne.. le lieu est inondé de lumière, vaste et parfaitement accueillant. Je suis passée ce jour là pour regarder, découvrir.. juste regarder les oeuvres prendre naissance sous cette belle voûte créatrice. Un collectionneur pousse toujours ainsi les portes de ces lieux paisibles, refuges de grande solitude pour l’artiste et d’inattendu pour le passant un peu animé par une envie impalpable de « surprise », d’étonnement.. de ce petit frisson intérieur qui, sans intention, débroussaille un bout de chemin parmi les strates d’états d’âme.. une aventure !! oui je pense qu’il s’agit d’une aventure..
Le printemps est là. Je me souviens les crocus sortaient de terre..

Quelle surprise m’attend une fois le seul franchi ?.. Il y a tout d’abord le silence et ce ton murmuré qui se calque sans entrave sur l’atmosphère recueillie des lieux !! tout est impeccable, telle une chambre d’enfant méticuleusement rangée avant un nouvel anniversaire, un presque Noël.
Il y a surtout le papier, partout, beau, blanc, aux grains parfaitement sélectionnés par l’artiste.. Il y a la fragilité de l’eau enroulée dans les couleurs délavées.. il y a le dessin, il y a la trace !! il y a tout simplement la présence d’un travail énorme, sans relâche d’inspiration, aucunement.. Il y a la beauté.
Il y a surtout l’émotion, une émotion timide au regard de  " tout ça " .. les dessins disent l’enfance, ils disent les animaux familiers, les lapins, les oiseaux, ils disent les éclats de moments capturés sur les rayonnages du temps.. il y a une sourde résonance avec ce qui, au fond de moi, demeure blotti dans l’inquiétude d’être révélée.. il y a tout ça, là, au grand jour sans dérangement aucun de cet atelier..
L’artiste ouvre de vastes tiroirs, dérange avec de délicates attentions le papier de soie, ou le papier calque, ces feuillets de transparence protecteurs des oeuvres.. Mon regard devient silencieusement bavard.. Il plonge derrière le dessin, recherche la matière et cette intention imperceptible mais totalement exprimée de l’artiste.. ou bien c’est moi qui, dans cet état de presque hypnose, pioche au fond de mon être des vagues de mémoires fanées et soudainement animées…

Le bonhomme de neige apparaît, ronde boule blanche poudrée pétrie par des mains enfantines.. oui ses bras sont ces deux branches dénudées et noueuses ramassées un jour d’hiver dans une allée de tilleuls argentés.. et la carotte vient d’être déterrée directement de ce lit de sable déposé dans la réserve des outils de jardin, dans l’obscurité. C’est ainsi que ces tubercules orangés passaient l’hiver.. jadis !!.. et le ciel bien sûr est cotonneux !!
Eternel bonhomme de neige..

 Françoise Pétrovitch - Bonhomme de Neige, 2013
© Collection IdL

lundi 19 décembre 2016

avec Bill Culbert

L'été je pense ronronnait sous les poiriers de " chambre avec vue ", là bas au bout du Luberon.. j'étais venue cueillir quelque fraîcheur au verger.. l'eau gargouillait au creux de ce petit ruisseau façonné par un artiste.. l'herbe était donc verte et n'avait pas succombé aux allures de paille qui soudain avaient tapissé la campagne de ce bout de sud par ailleurs particulièrement assoiffé.. les fruits à maturité ricochaient de temps à autre sur une table de bois à la solide élégance campagnarde..une guirlande de chaises aux tons fanés, mais ô combien " tendance" , gambade autour de cette espace convivial, ô combien!! ce doit être dimanche!! disons que c'est dimanche..
Des artistes sont là en résidence, des amis toquent à la lourde porte de la bâtisse et font escale au jardin.. au fil des heures, un couvert est dressé, savoureux et tellement généreux.. une bouteille de vin se débarrasse de son bouchon.. L'ombre du flacon s'affale sur le bois.. et là, Bill Culbert, discrètement attablé, saisit un appareil photographique et j'observe sa façon, avec la délicatesse muette d'un chat, de s'approcher de cette oeuvre, duo magnifique entre une bouteille de vin et son ombre. J'écoute alors les dire de Bill.. l'ombre et la lumière.. l'éclat.. ce pas deux improvisé.. le vert profond du flacon,  l'ombre sombre de sa silhouette allongée sur le bois. Clic clac.. l'oeuvre est !
Je comprends alors.. l'ombre et la lumière, les deux inséparables qui jouent au jour et à la nuit, aux éclats de rires et aux secousses de larmes.. oui la lumière est ombre. L'ombre est lumière. Une réconciliation!

Nous parlons, longtemps, sans bruit.. Bill évoque alors son travail. Je découvre ses créations articulées souvent autour du néon.. des bidons de plastiques alignés réunis par cette barre lumineuse, des chaises transpercées par cet éclair jaune.. il est aussi des valises !!
Une valise de voyage, Samsonite, indifférente et parfaitement banale.. la valise de tout le monde ..la valise qui prend l'avion et s'enfuit sur les tapis roulants des salles d'embarquements.. destinations inconnues.. confusion de tous ces départs, de tous ces retours.. des étiquettes articulent des noms de villes codifiés.

J'aime les valises.. des boîtes aux serrures.. pour les secrets.. les mystères.. je les soustraie souvent aux installations des antiquaires ou des brocanteurs.. elles me parlent de voyages imaginaires.. de ceux peut être rêvés au fond d'une cabane de l'enfance ou de ceux, irréalisables - mais si c'est pas sûr, c'est quand même peut être elles qui me transporteraient en des ailleurs improbables.. et vains !!

La valise au néon reste allumée sur mon plancher de chêne.. ma lumière ! petit faisceau rassurant.. nous nous évadons ensemble, quelquefois.. sur un tapis volant!
Nous revenons toujours, là !

Bill Culbert - Valise et néon, 2009 -
© Collection IdL






vendredi 16 décembre 2016

avec Pip Culbert en 2009 (3)

L'automne a déjà dévêtu nos campagnes.. quelques fruits presque squelettiques hésitent encore à rejoindre le tapis de feuilles rousses mises à terre.. une jonchée que nous nous surprenons toujours à piétiner..  un craquèlement enfantin radieux murmure alors la symphonie délicieuse d'autres automnes..
Mais ce jour d'octobre, ou de novembre peut-être, je suis au verger, à Saignon, chez Pierre et Kamila.. j'ai découvert ce lieu il y a peu.. là, j'ai pris doucement des habitudes d'escales en chambre d'hôtes.. être а la campagne..  vous savez.. pour un feu de cheminée, une balade dans les bois ou les champs de lavande, sous la haute protection du labrador au manteau champagne.. pour glisser aussi mes pieds  dans des godillots déformés, ces souliers toujours en attente dans une entrée.... la boue est là aussi, belle empreinte des pas, de la terre.
Ce jour donc, je déambule en ce verger.. les confitures ont été patiemment cuites, les fleurs cueillies ou séchées, les graines récoltées.. Une saison intermédiaire, immobile, juste suspendue aux rafales du vent et aux avalanches de pluie qui, sans tarder, gribouilleront cette palette de flanelle. Le bois aura été rentré.. l'hiver alors sera..
Là, au fond de ce verger, sous la protection bienveillante de ces fameuses pommes - ou poires - en fin de saison, deux chaises côte à côte. Non pas vraiment côte à côte plutôt posées en biais, le regard de l'une s'orientant vers l'autre, en angle droit.. les assises se frôlent, osent.. de veilles gabardines accaparent ces drôles de personnes, mi-vagabonds, mi- épouvantails.. des parures trop vastes, bien trop vastes pour ces carcasses décharnées.. soudain pour moi ces deux chaises de jardin décolorées par trop d'étés, par trop d'hivers, sont devenues " mes " deux personnages.. un dialogue muet mais tellement assourdissant.. tant de temps ensemble..
Il s'agit de Conversation, œuvre de Pip Culbert.
Galopent alors dans mon esprit de multiples interrogations sur " deux ", cet étrange et merveilleuse association de deux êtres qui clopin clopant traversent la vie.. demeurent la complicité, le frôlement des tissus, d'un genou.. un regard..  ils se tiennent encore la main et leurs peaux sont devenues trop grandes.. chut.. ils ont une histoire!..
Cette Conversation se poursuivra sur mon plancher de chêne.. venez les écouter!! ils disent encore tant..


Pip Culbert - Conversation - 2009
© Collection IdL 





jeudi 1 décembre 2016

avec Marcus Kreiss, Sophie Braganti, Soutard

C'est un soir de juillet  2012.. la lumière va bientôt s'absenter derrière l'horizon, là-bas, plein ouest.. Je viens du sud..

Ma petite carriole, étonnante roulotte d'une transhumance estivale, déborde de tous " mes " nécessaires, vaste inventaire biscornu qui animera, je sais, mon campement estival.. trois semaines au bord de l'océan, de l'Océan Atlantique, mon tremplin de joie et de vie balloté par les écumes et les coquillages, les prouesses des nuages, la dignité de la Dune du Pyla.. et la mélancolie du bassin, grande baignoire d'eau inlassablement dérangée par les mouvements perpétuels des marées.. six heures d'absence et le découvrement alors d'un tapis vaseux pigmenté de bigorneaux ébènes et de crabes boiteux.. six heures aussi d'eau immobile plantée alors des piquets sombres et moussus des parcs à huîtres.. sortes de sillons kidnappés à l'alignement des vignobles ! flottent alors les pinasses, vastes barques plates, de noir de goudron badigeonnées, bateaux des ostréiculteurs, les paysans des mers !!
C'est un véritable jardin, celui qui fut cet étonnant terrain de jeux et de découvertes, lorsque, enfant, une grand-mère de terrain nous conviait à savourer lа nos grandes vacances.. les rites du mois de juillet reprenaient alors, sans monotonie, petites merveilles qui scandaient nos jours et rassuraient les doutes du temps en partance..

Ce soir là, j'avais déjà récupéré la clé de cette grande maison de bois dénichée l'hiver précédent.. le vin de l' Entre deux Mers avait été livré..  en blanc, en rosé, en rouge.. de quoi colorer de plaisir les joues de ma petite troupe !
Les bicyclettes reposaient contre le grand pin..
Demain, et les jours suivants, mes amis, mes enfants, mes artistes..  arriveront, doucement, à leur rythme.. Ils sont tous convoqués pour réaliser un petit film, une vidéo d'art qui retiendra les dernières traces d'une maison de famille..  notre maison, celle de nos ancêtres depuis la Révolution, celle qui retiendra pour longtemps - pour toujours? - tous ces immenses minuscules qui se sont imprimés alors sur les murs, entre les portes, derrière les fenêtres, sous les carreaux de terre cuite ou du plancher à la française.. cette demeure emplie de toutes les imperfections que le temps, ce maître, a gravé sans camouflage, ni masque, aucunement.. Une demeure dans toute la brutalité de sa sincérité. Belle, juste belle, recroquevillée sous les empreintes de tant de saisons..

Marcus Kreiss est là, en famille. Il assurera le scénario et la musique de ce petit film. Nous nous sommes souvent rencontrés pour évoquer ce travail.. j'avais alors déroulé les rubans de mes mémoires.. lui seul est désormais  responsable d'essorer tout ça et de ne conserver que la dignité d'un au revoir sincère, sans dramaturgie aucune !..
Kamila Regent s'installera aussi dans une des cabanes de la maison de vacances. Kamila est galeriste.  Elle me présenta un jour Marcus. Elle sera notre coordonatrice, le chef d'orchestre du projet.
Mes quatre enfants s’éparpillent et puisent dans ce rassemblement les délices de véritables vacances familiales. Leurs amis vont et viennent, les bicyclettes s’éclipsent et reviennent.. les paniers et autres corbeilles de rotin regorgent vite de coquillages nacrés, inévitables cueillettes des bords de mer.. la grande table au-dessus du bassin est infinie.. nous sommes douze, nous sommes quinze, nous sommes dix !! la joie déborde, les rires ricochent sur les grands arbres, un ballon bondit de temps à autre et bouscule les verres.. Un piano, dans la vaste pièce, égrène ses notes.. il y a toujours un apprenti musicien de passage !!
Il y a Sophie Braganti, écrivain et poète. Elle s'installera dans la petite chambre, un peu monacale,  derrière la cuisine.. la nécessité du calme.. Elle rédigera là une nouvelle, Quand les volets, qui accompagnera aussi ce travail de mémoires.
A ses côtés une autre amie, Helga, poursuivra l’écriture, difficile, d'une épopée familiale.
Marie et son appareil photo a été conviée aussi pour capturer d'autres images..

Il est temps désormais d'envisager le voyage vers la grande demeure familiale magnifiquement bâtie sur les hauteurs des vignobles  bordelais. Elle nous attend. Elle est l'actrice principale de cette petite mémoire qui s'enroulera ensuite sur la bobine..

Nous passerons un jour tous ensemble là. Un seul jour de tournage..
Le 24 juillet 2012, une vingtaine de personnages se réunissent donc là bas, sur le perron moussu de Soutard.
Chacun découvre à sa façon les lieux.. il y a le potager, le poulailler, le cuvier, les greniers, le parc un peu dévasté par de trop nombreuses tempêtes.. les fleurs sauvages seules osent déranger les herbes folles.. Kamila cueillera ces étonnées pour de vastes bouquets..
Nous dresserons un couvert de fête.. le tire bouchon paternel fera encore résonner un bouchon de liège ..  l'ivresse familiale emplira les verres, une dernière fois.
François nous aura offert ensuite de délicieuses ripailles, de son bar à vins, l'Envers du décor, puisés.. vastes sacs de papier craft qui s’éparpilleront dans l'herbe, sous le somptueux hêtre pourpre..
Y'a de la joie !
Marcus concentre le tournage sur l'espace du bas.. les salons, la salle à manger, les longs corridors, terrains de nos galopades enfantines entre l'univers des grands parents et celui des parents.. notre petite frontière que nous traversions souvent sans permission..

Merci les enfants, mes enfants, de votre présence.

Au revoir forever..

La video de Marcus Kreiss est disponible 
sur demande par mail auprès de IdL. 
Ci-dessous quelques images qui en sont extraites 
de même que l'ouvrage de Sophie Braganti et Frédérique Nalbandian 
©Marcus Kreiss 2012   © Idl 2012   © Sophie Braganti 2012 

      






 "Quand les volets"- Sophie Braganti - Frédérique Nalbandian

        
  
  

mercredi 9 novembre 2016

avec Jérôme Soret

Jérôme Soret.. Il est ce photographe secret qui chemine, un appareil photographique toujours glissé derrière l’écran d'une veste, d'un par-dessus..  un appareil prêt à saisir l'image, celle qui révèlera ce que le regard-notre regard - voudrait tellement conter.. et qui s’échappe déjà tandis que l'artiste installe l'histoire  sur le papier..
Ces photographies sont les instants fugitifs de la mémoire qui, sans artifice, deviennent présences.

Jérôme aimait déambuler avec son ami François.. sillonner les recoins de son  univers rare et poétique, celui où viennent se blottir, pudiques, les presque rien.. les traces.. ses petits cailloux blancs contre l'oubli.. l'ordre et le désordre!
Ce jour de Juin, ces empreintes du temps en fuite se dévoilent sur les cimaises de la Galerie Agathe Gaillard.
Il y a cette corde tendue en ces improbables univers badigeonnés d'une patine indélébile.... des fils noués se tiennent suspendus à cette matrice bienveillante.. des fils, des bouts de ficelle.. en vrac.. ceux la mêmes que je recherche peut être toujours et encore pour recoudre les images du temps en partance.. ou ces bouts qui domptent la courbe des voiles pour d'autres voyages...

Jérôme Soret
Sans titre  " Fils blancs"- Saint Emilion
Tirage sur papier couleur 1/11
acquis en Juin 2012
© Collection IdL 







samedi 5 novembre 2016

avec Nicolas Jardry

Récemment, des amis firent escale sur mon plancher de chêne.. des amis qui ne connaissaient pas encore mon refuge en art, espace de lumière et de découvertes.. oeuvres picorées ça et là au fil du temps, des intentions, des désirs, des hasards et des belles folies aussi !! 

Ici, il n'y a ni ordonnance, ni plan d'accrochage.. pas de scénographie !! non, cette connaissance  n'est pas dans mon savoir faire.. je dirais même que chaque nouvelle oeuvre se glisse ici à sa façon, un peu empesée d'une sorte de timidité, ce même petit pincement ressenti par le nouveau, un jour de rentrée des classes.. 
Elle est " l’étrangère ", celle qui ne sait pas si son allure conviendra aux autres, aux anciennes ! 
Alors la nouvelle est juste posée là, ou ici.. et elle se débrouille !! je ne cherche pas non plus à jongler avec les couleurs, ni avec  les cadres, ni avec  les mensurations..
Il est un peu teinté d'esprit sauvage mon domaine !!

La nouvelle a donc trouvé sa place, toute seule.. elle demeurera un peu au sol, intimidée, entre des fleurs de cristal et un tabouret de sculpteur.. puis elle prendra de la hauteur et viendra tenir compagnie à un magnifique alignement de photographies, oeuvres magistrales de Lucien Clergue, de John Stewart ou de Malik Sidibé..

Ready to fly de Nicolas Jardry est donc adoptée et ses parures de bleu tissées attirèrent ce soir-là tout particulièrement le regard de mes invités!!
Elle est cette oeuvre qui, en La galerie d' Anne Clergue un soir de Mai, dompta aussi mon attention..
Certes l'azur ruisselle sur le papier, mais au-delà de cette palette claquante, c'est autre chose qui troubla mon attention.. le duo !! le multiplié par deux, un étonnement de l'enfance.. le mystère.. l'application du pliage.. la profondeur vertigineuse de la nature.. l' océan..  hissez haut !!



Nicolas Jardry - Ready to fly, Cuglieri 2013.
Tirage pigmentaire numérique
60 X 80 cm. Ex 1/3
© Collection IdL 2016


mercredi 12 octobre 2016

avec Pip Culbert (2)

Pip Culbert... ses dé-coutures!!

Des mouchoirs ainsi déshabillés de leur matière ont déjà galopé sur cette feuille avant de retenir leur géométrie architecturale sur mes cimaises!!

Ce soir, mon regard sera happé par ce petit cadre déposé là, sur un coin de mur, discret et d'une Simplicité  gigantesque.. l'infiniment beau.. blanc.

Le relief à peine perceptible de la couture, seule, évadée du vêtement, de l'objet usuel, pour se présenter ainsi sans artifice..  soudée à sa feuille de papier..
Une écriture en braille, presque.. le désir de laisser le doigt s'attarder sur ces petits bourrelets..  la trace de ce qui fut une poche de chemise, de tablier, de robe.. le savons-nous?? cette poche retint en son temps mille et un petits trésors ou la délicatesse d'un trait de pochette ô combien savamment replié.. élégance!!

La poche!! .. mise à nue!!

Une silhouette fine et légèrement rugueuse.. la trame du coton.. fermons les yeux et invitons notre imagination - un truc d'enfant, ça!  - au rêve.. et si c'était une maison à l'envers, sur pilotis?? ..un toit, quatre murs.. invincibles nous devenons alors, bien à l'abri dans notre cabane de fil..

Merci Pip. Tu as déposé cette oeuvre un jour dans mon jardin d'hiver.. Nous étions alors au verger, à Saignon, sous le grand poirier de Chambre avec Vue.. C'était l'automne.. les feuilles basculaient..

Pip Culbert - Poche décousue - ©Collection IdL




samedi 14 mai 2016

avec Lucy Marshall

Le joli mois de Mai danse dans les ruelles arlésiennes.. premiers chapeaux, premières robes de coton, le soir prolonge ses éclairages.. flâneries.. le teint des dames est saupoudré d'un soupçon de bonne mine, les messieurs flottent dans des chemises de lin, petits drapeaux d’élégance annonçant sans hésitation l'arrivée de l’été.. la légèreté est tendance !

Flair Galerie a invité une artiste australienne.. l'autre face du monde caracole sur les cimaises.. le talent de cet artiste est ourlé d'esprit joyeux.. le dialogue tambourine vite entre les deux pôles de la
terre.. Lucy est lumineuse.. Isabelle Wisniak est rayonnante !!  Notre galeriste a le talent de " dénicher " (nous sommes bien à Flair Galerie !) des artistes venus d'ailleurs, de terroirs et de territoires particuliers.

Le désir de surprendre, attentive toujours à la qualité, l'extrême qualité.
Chaque œuvre, chaque dessin de Lucy Marshall nous entraînent dans une farandole allégée de toute obscurité, de toute densité inquiétante, de tout soupçon de tragédie. La joie est communicative.. Nous parlons art, voyages, l'esprit gourmand et le regard pétillant !!

Nous osons sourire, rire ! Ces instants sont merveilleux.. le projet déjà de nous asseoir tout à l'heure à la même table, place du Forum, festin en attente..la table du Pop'up du Nord Pinus est enchantement. gourmandise, ivresse.. la promesse aussi bien entendu de traverser le monde pour se revoir..

Je descends la rue de la Calade. Le jour ne s'enfuit pas encore et je sais que bientôt le dessin National Pawtrait Gallery distraira avec audace et talent le cours de mes cimaises..
J'aime les traces, les empreintes.. celles que les escargots dessinaient alors sur la terre de l'enfance lors des courses de ces fameux gastéropodes à coquille !
J'aime les petits billets oubliés entre les pages des ouvrages de nos bibliothèques.. reculer dans la vie
d'avant..

J'aime la trace..peut être aussi en souvenir de la visite de Droopy sur mon plateau de chêne…


Lucy Marshall (The Dogophile) National Pawtrait gallery, 2016
Encre pigmentée et aquarelle sur papier 100% coton
29,7 x 42 cm
©Collection IdL



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mercredi 20 avril 2016

avec Franck K. Lundangi

C'est en avril et c'est à Paris.. le temps du salon du dessin contemporain Drawing now, au Carreau du Temple, cœur de Paris.

Ce salon est devenu pour moi une vraie cérémonie!! un rituel, une attente qui fait battre mon âme de petite fille.. Bien sûr, au même moment, Art Paris envahit le Grand Palais.. Art Paris aux stands vastes et élancés, irréprochables.. J'y fus, certes, élève appliquée toujours et un peu alarmée par le mouvement artistique du moment.. une cathédrale comparée à la confidentialité du Carreau du Temple.

Là, sous sa structure historique et désormais métallique (au cours des siècles elle fut construction de bois), le murmure est de rigueur, les voix sont de douceur badigeonnées, comme si la crainte d'effacer les traits de crayon imposait le ton.. un cri serait gommage ! l'impression que les amateurs d'art et de dessin ont glissé leurs pieds dans des pantoufles..

Je parcours les travées, heureuse de retrouver " mes " galeries, attentive aussi à oser gravir le seuil des " inconnues ".. des rendez vous incontournables.. une sorte de club.
Des sourires sans maquillage ni intention aucune de vanité, des yeux vifs et interrogateurs constituent  le langage  des galeristes et des collectionneurs. Chacun connaît la règle du jeu.. ne pas tricher, ne pas fanfaronner.. et, ô étonnement sans cesse renouvelé,  des œuvres plus spécialement s'imposent quelque part dans les strates indomptables de mes envies.. une première sélection..
Je deviens alors chasseresse. Je danse presque entre les stands.. je suis à l'affût, à l'arrêt.. un moment important.. comme à la chasse, ou à la pêche.. savoir attendre, dompter ses envies et.. arrêt sur image..
L'impossibilité alors de renoncer !! c'est terrifiant, ravageur mais ô combien pétillant de calme intérieur aussi.. paradoxe ! Il y a du mystique là-dedans !

L'œuvre de Franck K. Lundangi, The spiritual man dans la Galerie d'Anne de Villepoix sera glissée dans ma besace.. un trophée..
Une aquarelle qui me confie l'eau, la terre, le ciel, un peu Arche de Noé.. Arbre de Vie..
Il y a de la Joie !

 Franck Lundangi - The spiritual man, 2016 
Watercolor on paper - 76x56cm © Collection IdL 



jeudi 24 mars 2016

avec Tatiana Wolska


Le salon du dessin contemporain, Drawing now.

Nous avons déjà déambulé ensemble dans ces travées de chuchotements et de mines de plomb.. Je retrouve les galeries de mes habitudes..  dirigeons nous vite vers la Galerie Papillon... l’éclat des deux sourires de Claudine et Marion.. et sur les cimaises, chaque année, des signatures nouvelles jonchent les toiles.. Tatiana Wolska 
J'apprends..
Je sais l'application de la main, audacieuse et concentrée, seule baguette dirigeant sans tremblement aucun la composition d'une empreinte sur le papier. L’étonnement enivre mes pupilles.. je ne saurai jamais dire ce brin de folie qui, soudain, vient picoter une certaine maîtrise de mes désirs..

Pourquoi un dessin d'encre et d'acrylique vient-il perturber l'ordonnance de mon maintien ? Pourquoi tout voile d'indifférence se trouve-t-il  soudainement arraché à la trame sereine de mes intentions ?
Pourquoi un dessin se précipite-t-il  vers moi ?
Il me conte très certainement, avec des mots grappillés dans les empilements de mes souvenirs, de mes émotions, de mes doutes et de mes victoires, il me conte ce que jamais je ne saurai dénicher sans la magnificence de l'Art.. complices nous devenons !!

Ce dessin lа serait une paupière de cils broussailleux, non peignés.. ou une frange d'herbes plantées dans les dunes pour retenir le sable, là-bas sur les plages de l'Atlantique ?.. d'ailleurs, quelques grains dorés barbotent dans l'eau salée à peine bleutée.. j'aime aussi ce minuscule trait d'encre échappé de la plume.. petit confetti de l'imprévu !

Le printemps n'ose pas encore.. Le ciel de Paris est toujours un peu hivernal, poinçonné de discrètes  intentions de lumière bariolée de renouveau..


Tatiana Wolska - Sans Titre, 2016
(42 X 56 cm) -  Détail
© Collection IdL